Accueillir la vie

Accoucher chez soi, est-ce que c’est dangereux ?

Je vous fais grâce d’une introduction, j’ai déjà écrit un tel pavé… Vous savez que je souhaite accoucher chez moi pour ce 2ème bébé, vous savez pourquoi… et maintenant vous allez savoir, si vous avez le courage de me lire en entier, si c’est dangereux 😉

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1/ Accoucher chez soi, les femmes en ont le droit… mais pas les moyens !

Il faut d’abord distinguer 3 façons d’accoucher chez soi :

  • L’Accouchement à domicile encadré par une sage-femme (AAD).

Le cadre légal de l’AAD est complexe ; les parents ont le droit de choisir un accouchement à la maison, mais depuis 2002 et la loi Kouchner, les autorités sanitaires exigent des sages-femmes qui pratiquent l’accouchement à domicile qu’elles contractent une assurance dont le coût s’élève à environ 20 000€/an. Quand on sait ce que gagne une sage-femme, c’est impossible pour elles de se soumettre à cette obligation ! Les sages-femmes qui continuent à pratiquer l’AAD (elles sont aujourd’hui une soixantaine dans toute la France) le font à leurs risques et périls ; elles risquent une amende, la prison et la radiation. En cas de procès (intenté par les parents par exemple, mais aussi par leur famille par exemple !), elles sont responsables sur leurs biens personnels. Ce sont donc des militantes, qui se battent par passion et pour permettre aux femmes d’exercer leur droit à choisir les conditions de naissance qu’elles souhaitent pour elles et leur bébé.

  • L’accouchement non assisté (ANA) qui est un choix des parents d’accoucher à la maison sans aucune assistance médicale. En France, aucun texte n’oblige les parents à être accompagnés pour l’accouchement et les parents ont le droit de décider de gérer cet événement seuls à 100%. En réalité, de nombreux ANA sont des projets d’AAD qui n’ont pas pu aboutir, faute de sage-femme pratiquant l’accompagnement global et l’accouchement à domicile dans leur région (cf point précédent !), ou parce qu’aucune sage-femme n’a accepté de les suivre dans le projet à cause des facteurs de complication (exemple : bébé en siège, accouchement après une césarienne…).

 

  • L’accouchement inopiné, à savoir un accouchement tellement rapide qu’il se déroule à la maison et sans assistance ou seulement celle des pompiers, sans que ce soit le choix initial des parents.

Qu’est ce qui est dangereux la dedans ?

C’est le nombre croissant d’ANA choisis par faute de sages-femmes pouvant pratiquer l’AAD, alors que les femmes sont de plus en plus nombreuses à vouloir se réapproprier le moment de la naissance ! Certaines femmes ont subi de telles violences à l’hôpital qu’il est inenvisageables pour elles d’y remettre les pieds. D’autres ont un désir profond d’accoucher chez elle, sans savoir que c’est une possibilité (vu la diabolisation de l’AAD) et tardent à partir à la maternité le jour J, jusqu’à ce qu’il soit trop tard et qu’elles accouchent seules chez elles. Ces femmes prennent effectivement des risques supplémentaires, qui pourraient être évitées si le cadre légal de l’AAD était revu, si les maisons de naissance étaient encouragées, si les sages-femmes avaient davantage accès à des plateaux techniques dans toutes les maternités au lieu d’être diabolisées…

C’est la responsabilité et le poids qui pèse lourd sur les épaules des sages-femmes qui prennent ce risque personnel. Exercer dans un tel cadre ne peut pas les aider à être aussi confiantes et calmes qu’elles pourraient/devraient l’être lors des AAD qu’elles pratiquent !

Au passage, ce cadre légal très décourageant par rapport à l’AAD engendre une politique de remboursement peu favorable pour les parents. Les professionnels de santé sont payés par la sécurité sociale « à l’acte » (=plus ils interviennent, plus ils gagnent ). Dans le cadre d’un AAD, la sécurité sociale rembourse uniquement l’acte technique de « faire sortir le bébé », pour un montant de 350€. C’est tout. Or avec la disponibilité qu’un AAD demande, le temps de présence exclusif, etc. la plupart des sages-femmes pratiquent un dépassement d’honoraire bien légitime, entre 500€ et 1 500€ pour réaliser l’AAD, aux frais des parents. Voyez donc : choisissez d’accoucher en maternité publique, avec intervention du gynécologue, de l’anesthésiste, 5 jours nourris, logé, blanchi… il y en a pour plusieurs milliers d’euros, aux frais de la princesse. Faites le choix d’un AAD, qui coûterait 5 fois moins à la société, vous en êtes de votre poche… Dommage, non ?

 

2/ Un AAD, c’est très encadré !

> La grossesse, l’accouchement et le post-partum sont suivis par la même sage-femme, qui connait donc très bien les parents, leur dossier médical mais aussi leurs attentes, leur personnalité, leurs craintes et éventuels blocages… C’est une vraie relation de confiance à 3. Le jour de l’accouchement, la sage-femme est disponible à 100% pour le couple, elle ne gère pas plusieurs accouchements (et ses obligations administratives) en même temps, comme à l’hôpital. Par sa connaissance du couple, elle beaucoup d’indicateurs (autres que le toucher vaginal qui n’est pas toujours significatif !) pour évaluer le bon déroulé du travail et estimer si l’accouchement reste physiologique ou s’il se complique. Le suivi global participe réellement à la sécurité de l’accouchement.

> Chaque sage-femme AAD fixe, en fonction de son expérience, les critères qui lui permettent ou non d’accepter de suivre une femme dans un projet d’AAD. Vu le cadre légal dans lequel elles exercent, les SF en France peuvent pêcher davantage par excès de prudence que de confiance ! Ainsi, elles ne suivront pas l’accouchement à la maison s’il s’agit de grossesse multiple, d’un bébé qui se présente en siège, si le bébé nait avant 37SA… En majorité, elles refuseront également le projet si la maman présente un streptocoque B en fin de grossesse, en cas d’hypertension ou tout d’autres facteurs de complication en cours de grossesse concernant la mère (hémorragie…) ou le bébé (retard de croissance, anomalie placentaire…). Sur d’autres critères, les SF sont plus partagées selon leurs expériences, notamment concernant les femmes ayant eu une césarienne pour une précédente grossesse (AVAC = accouchement vaginal après césarienne), le diabète (s’il est équilibré, l’AAD reste envisageable pour beaucoup), les femmes ayant eu un antécédent d’hémorragie du post-partum (sur ce point, Michel Odent et pas mal de sages-femmes incriminent principalement les conditions d’accouchement en structure et l’utilisation abusive de syntocinon, l’ocytocine de synthèse, pendant le travail !), le dépassement de terme… Malgré cette longue liste, les grossesse 100% physiologiques représentent quand même 80% des grossesses ! Tous ces facteurs ne prédisent pas que l’accouchement va forcément être compliqué et qu’un accouchement physiologique est impossible, mais ils augmentent le risque qu’une intervention médicale soit nécessaire pour la mère et/ou pour le bébé et rendent la naissance en structure plus sécuritaire.

L’AAD est donc un projet jusqu’au dernier jour de la grossesse ; dès que la grossesse n’est plus physiologique, simple, sans complication, la SF demande que l’accouchement soit réalisé en structure (plateau technique si elle y a accès, auquel cas c’est elle qui peut assurer le suivi de l’accouchement en se soumettant plus ou moins aux protocoles de la maternité d’accueil, ou transfert dans la maternité du choix des parents avec les équipes de cette maternité). Les SF exigent donc toujours que les femmes s’inscrivent dans une maternité et qu’elles réalisent l’entretien avec l’anesthésiste, en cas de transfert le jour J. De plus, les rendez-vous de suivi ont avant tout pour objectif de développer la relation de confiance et de travailler sur les blocages psychologiques du couple ; même dans le cadre d’une grosse 100% physiologique « éligible » sur le papier à l’AAD, la SF peut suggérer de mettre en place un autre projet pour la naissance que l’AAD si elle perçoit des signes lui indiquant que les parents ne sont pas prêts ou ne font pas ce choix pour les bonnes raisons.

> Le jour J, la SF ne débarque pas les mains dans les poches, un spliff à la bouche, avec juste des serviettes chaudes dans sa valoche ! Elle vient avec un doppler portatif lui permettant d’écouter le cœur du bébé sans déranger/immobiliser la maman ( remarque à ce sujet : les études menées suite à l’avènement du monitoring en continu en maternité montrent que cela a contribué à augmenter le nombre d’intervention d’urgences sans amélioration sur la santé des mères et des bébés, voir M.Odent), du matériel lui permettant certaines intervention comme la rupture de la poche des eaux ou l’épisiotomie (bien qu’elles sont rares à les pratiquer dans le cadre d’un AAD !), de quoi faire une perfusion d’ocytocine si le placenta ne se décolle pas, de quoi prendre en charge un début d’hémorragie ou une détresse respiratoire du bébé…

A son arrivée sur place, elle vérifie la position du bébé, la couleur du liquide s’il y a eu fissure ou rupture des membranes… 1ere étape pour que l’AAD puisse se poursuivre. Tout au long du travail, si un voyant passe à l’orange, elle va demander le transfert ; des pertes anormales, une anomalie du rythme fœtale mais aussi un travail trop long, une stagnation du travail (il n’est pas question de définir un cadre 1 heure = 1 cm, mais d’observer une montée en puissance de l’accouchement, pour qu’on puisse dire qu’on est toujours dans la « physiologie » et pas seulement dans le naturel) ou une maman qui s’enferme dans la souffrance de sorte que le travail est bloqué… Les signaux sont parfois subtils et c’est sa grande expérience de la physiologie, couplée à la connaissance du couple, qui est un atout pour lui faire sentir que la naissance serait plus sécuritaire à l’hôpital.

Après la naissance, la SF évalue la bonne santé du bébé et de la maman, qu’elle peut recoudre si nécessaire et surveille l’état de tout le monde pendant 2 à 3 heures. Les jours suivants, elle rend visite aux parents à domicile pour les soins de la mère et de l’enfant (elle peut par exemple réaliser le test de Guthrie fait en maternité si les parents le souhaitent) et se tient disponible en cas de difficultés.

Ainsi, 95% des transferts réalisés en cours de travail se font dans le calme, avec les moyens personnels du couple et dans l’idée de préserver au maximum la bulle dans laquelle ils se sont mis avant. On est loin de l’image des pompiers qui débarquent et de la mère qui sort en hurlant sur un brancard en pissant le sang !

accouchement à domicile est ce dangereux
Image tirée du documentaire « entre leurs mains ». Donc la SF elle a pas que des serviette et une bassine d’eau chaude a disposition….

 

3/ Un AAD, ce n’est pas plus risqué (ce sont les statistiques qui le disent) !

J’ai lu pas mal de documents que j’ai pu trouver, mais je vais ici m’appuyer sur le travail de synthèse réalisés par Cathy-Anne PIREYN-PIETTE dans le cadre de son mémoire de sage-femme. Elle y rapporte les conclusions de 5 études menées de 1977 à 2004 comparant, dans des groupes de femmes similaires à bas risque, les résultats des AAD (naissance à la maison prévue et encadrée) et ceux des AHP (accouchements hospitaliers prévus).

Ces études montrent globalement :

  • Des taux de mortalité maternelle et infantile comparables entre les AAD et les accouchements en maternité pour des grossesses physiologiques.
  • Des taux de morbidité maternelle (déchirure, hémorragie…) et infantile (score d’APGAR) significativement plus favorables dans le cadre d’un AAD pour les multipare (=2ème grossesse au moins) et comparables ou favorables à l’AAD pour les primipares. La différence de résultats entre les primipares et les autres s’explique principalement par un taux de transfert en cours de travail plus important ; il y a 4 fois plus de transferts chez les primipares.
  • Des taux d’interventions médicales (déclenchement, direction du travail, instruments, épisiotomie, césarienne…) nettement supérieurs pour l’AHP, en dépit des taux de transfert dans le cadre des AAD.
  • Des taux de satisfaction par rapport au vécu de la naissance significativement meilleurs dans le cadre d’un AAD, primipares et multipares confondues.

 

Pour devancer d’éventuelles critiques, d’un point de vue statistique, ces études ont effectivement une limite, qui est bien discutée dans le mémoire :

> La taille de l’échantillon est limitée par le faible pourcentage de femmes choisissant l’AAD : ici, 24092 femmes étudiées pour la 1ère étude, 1836 pour la 2ème, 874 pour la 3ème, 8043 pour la 4ème et 2176 pour la 5ème. De ce fait, les études peuvent ne pas montrer des différences de mortalité maternelle ou infantile entre les groupes ou des évènements obstétricaux rares.

> Elles ne sont pas randomisées, c’est-à-dire que la répartition des femmes entre AAD et maternité n’est pas faite au hasard mais sur la base des décisions prises par les couples. D’un point de vue éthique ce serait impossible de faire autrement ! Par ailleurs, la physiologie de l’accouchement étant étroitement liée aux éventuels blocages psychologiques de la mère, une étude randomisée fausserait les résultats : les AAD ont beaucoup plus de risques de complications si les femmes le subissent et ne se sentent pas en sécurité avec ce choix !

Pour compenser le biais de l’échantillon AAD auto-séléctionné, l’échantillon AHP a été recruté pour correspondre à l’échantillon AAD et les différences ont été contrôlées statistiquement.

En conclusion, pour rester strictement prudent au vu de ces biais, on peut affirmer aucune étude sérieuse ne démontre que l’AAD est plus dangereux que l’accouchement en structure hospitalière.

J’en profite pour rappeler que la France est au 12ème rang européen pour le taux de mortalité périnatale et au 15ème rang pour la mortalité maternelle, en dépit d’un taux d’intervention et notamment de césarienne qui est en constante augmentation. Alors que le taux de mortalité périnatale est en baisse en Europe (projet Euro-Peristat, coordonné par l’INSERM) ce n’est pas le cas en France. Peut-être l’occasion de remettre en cause nos nos certitudes sur le fait que l’hypermédicalisation en France et le déplacement de la naissance du domicile à la maternité ont été les facteurs de sécurisation de la naissance, alors qu’en réalité ce sont avant tout l’amélioration des conditions d’hygiène et les progrès réalisés en matière de dépistage (maladies, malformations…) et de suivi des grossesses qui ont fait baisser le taux de mortalité en couches ! La médecine sécurise la naissance oui, lorsqu’elle est au service de la pathologie, pas de la physiologie 😉

4/ L’AAD : des conditions qui favorisent un accouchement sans complication (toutes conditions égales par ailleurs)

Nous sommes des mammifères ; c’est vrai tout le temps mais c’est d’autant plus crucial d’en avoir conscience quand on parle de l’enfantement, puisque ce « savoir accoucher » est inscrit dans le cerveau archaïque (ou reptilien), la partie cerveau « ancienne » de notre cerveau que nous partageons avec les autres mammifères. Cette partie de notre cerveau gère tout ce que nous savons faire « sans y penser », nos réflexes de fuite et d’attaque, tout ce qui a permis la survie de notre espèce au cours du temps. La spécificité de l’Homme par rapport aux autres mammifères, c’est d’avoir un néocortex extrêmement développé ; ce « nouveau cerveau », pour faire vraiment très schématique, est celui « qui pense », qui nous permet de nous contrôler, d’avoir des comportements acceptables socialement, de réguler nos émotions et nos pulsions, d’avoir des raisonnements rationnels et logiques… J’en ai déjà parlé plusieurs fois ici au sujet des enfants, puisqu’à la naissance le néocortex du bébé humain est encore très immature, d’où une difficulté pour les enfants à contrôler leurs émotions et leurs pulsions. C’est ce néocortex qu’il faut réussir à bâillonner pendant l’accouchement !

Lors de tout acte sexuel, donc lors de l’accouchement, le processus évolutif (qui permet la survie de l’espèce) a prévu la « mise en veille » du néocortex au profit des structures cérébrales archaïques que sont l’hypothalamus et la glande hypophysaire, d’où viennent toutes les hormones nécessaires à l’accouchement.

Concrètement, cela veut dire que nous savons, en nous, comment accoucher. Mais en France en 2017, ce savoir nous est souvent rendu inaccessible par une multitude de barrières :

> Le conditionnement négatif vis-à-vis de l’accouchement

Les femmes vivent leur grossesse baignées par des discours alarmistes autour de la grossesse et de l’accouchement, les présentant comme des événements à hauts risques par nature. La plupart des femmes grandissent en entendant qu’elles ne sont pas capables de porter la vie et de donner naissance sans assistance, que ce sont les médecins qui accouchent les femmes, que c’est le déplacement de la naissance de la maison vers la maternité qui a sécurisé la naissance. Une fois enceinte, on les prépare à l’accouchement comme on leur apprendrait un savoir abstrait qu’elles ignorent ; il y a des cours à suivre, il y a une façon de respirer (n’est-ce pas angoissant, cette idée qu’on pourrait ne pas correctement RESPIRER si on n’y faisait pas gaffe, dans un moment aussi crucial ?), il y a une façon de pousser et surtout il y aura quelqu’un pour décider quoi faire, quand et comment, tout du long. Enfin, ce moment est souvent entouré d’un imaginaire collectif très négatif ; les histoires qui se partagent volontiers sont souvent sanglantes, douloureuses, dangereuses… Difficile de ce contexte d’aborder la naissance sereine, confiante, comme une étape de la vie pour laquelle nous avons toutes les compétences nécessaire !

> Le non-accompagnement de la douleur

Le corollaire, c’est que les femmes sont amenées à voir la grossesse et la naissance comme un moment de leur vie où elles doivent être intégralement prises en charge. Elles ne savent rien, le corps médical sait et elles s’en remettent à lui, concernant leur corps, leur bébé, les décisions à prendre. C’est particulièrement vrai pour la question de la douleur ; malgré tous les discours alarmistes et les récits « films d’horreur », la femme n’est pas vraiment amenée pendant sa grossesse à considérer la question de la douleur. Ou plutôt, elle la considère en ces termes : tenir jusqu’à ce qu’on puisse lui poser une péridurale. Que la douleur soit prise en charge. En France on ne voit pas la péridurale comme une analgésie salvatrice dans certains cas, dans certaines situations, pour certaines femmes ; c’est un modèle qu’on applique à toutes. Celles qui envisagent de s’en passer, pour X raison, se débrouillent par leurs propres moyens pour se préparer, pas toujours efficacement. En France, on ne parle plus de sens de la douleur dans l’enfantement, du rôle de guide et de protection qu’elle joue, en amenant la mère à modifier sa posture pour limiter les dégâts du processus d’ouverture sur son corps et réduire la pression sur la tête du bébé. Une SF AAD expliquait qu’elle ne se sentirait plus en sécurité de pratiquer des accouchements sous péridurale car elle aurait l’impression de naviguer à l’aveugle, sans repères donnés par la femme. On parle peu de ses effets sur le bébé et de sa perturbation de la physiologie de l’accouchement, qui devrait pourtant être un thème central. Parce qu’aujourd’hui la question de la douleur se résume à « comment la supprimer », de nombreuses femmes sont désemparées le jour de l’accouchement : parce que l’ouverture des premiers centimètres est interminablement douloureuse avant d’y avoir « droit », parce que l’anesthésiste n’est pas disponible (et alors toute leur énergie est mobilisée à le maudire !) ou que pour une raison ou une autre elles ne peuvent pas tout de suite en bénéficier, et alors elles subissent de façon extrêmement violente la situation… Parce que subir, par nature, c’est insupportable. Et puis, il y a celles à qui on la pose et chez qui elle ne fonctionne pas, ou mal, ou de façon asymétrique et qui ne savent plus où elles en sont face à des soignants qui ne savent pas comment les traiter. On ne parle plus non plus de l’aspect psychologique de la douleur, de la peur de mourir, physiquement et symboliquement, qui traverse normalement la femme qui accouche. De cette peur qui peut augmenter la douleur et bloquer les antalgiques naturels sécrétés par le corps (endorphines, notamment). De ce combat qui se livre à l’intérieur du corps et de l’esprit, quand il faut choisir entre se préserver ou préserver son bébé. Parce qu’on ne parle pas de ce grand pas dans le vide qu’il faut oser faire, lorsqu’on traverse ce moment naturel où on se dit qu’on n’est pas capable, qu’on ne peut pas supporter plus, qu’on ne peut pas s’ouvrir plus, la plupart des femmes pensent ne pas être capables. Pourtant, celles qui l’ont fait ont-elles aussi vécu cette désespérance ; ce n’est pas une faiblesse ni la preuve de notre incapacité, c’est la physiologie pure. La physiologie mal connue de l’accouchement…

> L’environnement non favorable à l’accouchement en salle de naissance

Là, c’est un peu le bouquet, le pompon sur la Garonne. Parce qu’on connait mal la physiologie de l’accouchement et qu’on s’est concentrés sur le progrès technologique, nous avons oublié que nous sommes des mammifères et qu’à ce titre, notre besoin premier pour pouvoir accoucher simplement est le besoin de se sentir en sécurisé, et que cela passe par le besoin de d’intimité. Dans la nature, tous les mammifères s’isolent de leur troupeau pour mettre bas et recherchent la solitude, la pénombre et les petits espaces, comme les chattes qui se font une place au chaud dans un placard. Les mammifères adoptent naturellement ces comportements d’isolement inscrits dans leurs gênes, mais chez l’Homme, le surdéveloppement du néocortex est une barrière à l’enfantement. Non seulement, la femme a des difficultés à « lâcher prise », à « débrancher » son cerveau et se laisser guider par ses instincts et son corps sans rationaliser, mais en prime la « rationalité ambiante », aka ici la généralisation de l’accouchement en structure, a mené à la mise en place d’un environnement non-favorable à l’accouchement physiologique :

>> Tout changement dans l’environnement ou toute sensation d’inconnu va éveiller un sentiment de danger : on ne peut pas se laisser aller et débrancher son néocortex. La dynamique de l’accouchement s’appuie sur la dichtomie adrénaline (=hormone en situation de stress) et ocytocine (=hormone de l’amour, qui provoque les contractions). Pour pouvoir produire de l’ocytocine, il faut un taux bas d’adrénaline. Pour cela, un seul moyen ; se sentir en sécurité ! Pour cette raison, le fait d’accoucher chez soi, dans son environnement familier, entouré de personnes connues et de confiance, sans changement tout au long du travail, favorise le bon déroulé de l’accouchement en permettant un « débranchage » complet du néocortex. Il n’y a pas de rupture dans le rythme qui s’installe. A l’hôpital :

 

  • On quitte sa maison pour un lieu inconnu, qu’on a au mieux visité une fois ;
  • On est pris en charge par une équipe composée de plusieurs personnes, qui peuvent changer en cours de travail selon la durée de celui-ci et le planning de garde ;
  • On est accueilli dans une première salle d’examen, puis une salle de pré-travail, puis une salle de naissance ;
  • Les protocoles qui sont appliqués contribuent à l’augmentation d’un sentiment de danger (perfusion, monitoring)

 

>> Le néocortex est stimulé/réveillé par les éléments suivants : la lumière, l’agitation, l’anxiété ambiante (qui se propage), le langage (qui est le propre de l’humain et a passe par le néocortex pour être décodé) et en particuliers les discours rationnels. A la maison, le travail s’effectue dans le silence à partir du moment où la femme est dans sa bulle : la SF parle peu, ne donne pas d’indications sur le déroulé du travail sauf à la demande de la femme. Souvent, la SF ne reste pas à côté de la femme pendant le travail, elle suit à l’oreille dans une autre pièce, elle veille à rester calme, à intervenir le moins possible tout en restant hypervigilante. C’est sa présence qui est rassurante pour le couple, pas son action. La maison est dans la pénombre, éclairée par des bougies. La femme choisi souvent la plus petite pièce de la maison ou un petit recoin pour accoucher. A l’hôpital :

 

  • La femme est allongée plus ou moins nue, exposées au regard du personnel soignant qui est debout et habillé, elle se sait observée ;
  • La salle de travail est souvent très grande, la femme est au centre, entourée de vide ;
  • Le travail est régulièrement évalué, les discours sont médicalisés, les discours sont rationnels, les protocoles sont parfois brandis comme des menaces ;
  • Au moment de l’expulsion, le personnel s’agite, sort du matériel, indique qu’on passe à une phase suivante ;
  • La lumière est vive, un projecteur est braqué sur le vagin au moment de l’expulsion.

 

>> A l’inverse, le déroulé « simple » de l’accouchement et la production d’hormones analgésiques vont être favorisé par : l’eau, l’intimité, le cri et la prise de position libre pendant le travail, en fonction des sensations douloureuses. A la maison, bien évidemment on est en toute intimité. On peut crier comme on le souhaite, sans crainte d’effrayer les voisines de salle et d’entendre le personnel dire qu’on « en rajoute » aux autres patientes. Les femmes passent un temps assez important sous la douche ou dans leur baignoire, à leur convenance, ce qui soulage énormément la douleur. Le couple est libre de ses mouvements. Le père est libre de vaquer à ses occupations pour faire baisser son niveau de stress et être vraiment disponible ensuite. La femme peut marcher ou rester immobile selon ce qui lui convient, prendre les positions qui la soulagent le plus, sans contraintes imposées par la SF, uniquement guidés par ses sensations. Se faisant, elle s’adapte en fait au chemin fait par le bébé ; quand il est « coincé » quelque part, elle prend naturellement les positions qui la soulage et qui le soulage. Ainsi, de nombreux bébés qui ne s’engagent pas ou mal dans le bassin sont la conséquence d’une immobilisation pendant le travail (ou d’une rupture artificielle de la poche des eaux), une complication rare à la maison.

On ne parle ici que de l’environnement et de choses relativement simples à faire évoluer ; la prise de conscience de ces facteurs permettrait d’améliorer facilement les conditions dans lesquelles se déroule la naissance à l’hôpital. Mais en l’état actuel des choses, l’environnement de la plupart des structures hospitalières n’est pas favorable au bon déroulement de l’accouchement physiologique et, en cela, l’accouchement a davantage de chances de se dérouler facilement à la maison, toutes conditions égales par ailleurs.

 

> Les effets iatrogènes de la surmédicalisation

Allons maintenant plus loin que la question de l’environnement ; parlons des gestes, des interventions médicales et de leur possible effet iatrogène. (NB iatrogène = se dit d’un trouble, d’une maladie provoqués par un acte médical ou par les médicaments, même en l’absence d’erreur du médecin). Lorsqu’un accouchement se déroule physiologiquement, il y a davantage de risques à vouloir intervenir qu’à laisser faire ; c’est ce qui sous-tend la pratique des sages-femmes qui pratiquent l’accouchement à domicile ou de rares gynécologues défenseurs de la naissance respectée comme l’emblématique Michel Odent.

Ces professionnels parlent de l’effet en cascade de certaines interventions ; face à une situation au départ simple, une intervention trop rapide, motivée par la peur des complications/par l’application stricte d’un protocole/par la méconnaissance de la physiologie, entraine le besoin de davantage d’interventions et aboutit à une situation compliquée. Les femmes sont peu nombreuses à en avoir conscience, mais une part de celles qui estiment que l’hôpital « les a sauvées » lors de la naissance de leur enfant se sont retrouvées dans une situation où elles ne se seraient jamais retrouvée en l’absence d’intervention.

Un exemple simple : une femme arrive à l’hôpital en début de travail, ouverte à 2. Du fait du changement de l’environnement ou du trajet en voiture ou de l’explosion de sa bulle quand on lui annonce qu’elle n’est qu’à 2 ou parce qu’elle est en train de se dire que la SF de garde est celle qu’elle n’aime pas et qu’elle n’a pas eu le temps de s’épiler ou de l’immobilisation pour un monitoring ou parce que c’est son rythme d’enfantement à elle, le travail est lent, les contractions semblent peu efficaces pour dilater le col. Son travail progresse, mais plus lentement que le 1 cm = 1 heure. L’équipe craint que le travail stagne et injecte du syntocinon (=ocytocine de synthèse pour provoquer des contractions) en perfusion. On a quitté la physiologie. Les contractions ainsi induites médicalement sont plus difficiles à supporter pour la maman, son rythme est cassé; dès qu’elle peut elle demande une péridurale. Elle est immobilisée, allongée sur un lit. Les contractions provoquées sont aussi plus difficiles à supporter pour le bébé, ce n’est pas « son » rythme ; le monitoring montre des anomalies du rythme cardiaque. De plus, l’analgésie péridurale induit également des ralentissements du rythme et l’immobilité de la mère ne l’aide pas à s’engager. Diagnostique : souffrance fœtale et bébé qui ne s’engage pas, césarienne d’urgence. « Heureusement que j’étais à l’hôpital ! ».

Quels sont-ils, ces gestes aux possibles effets iatrogènes ?

  • L’immobilisation de la mère (pour monitoring, perfusion ou péridurale) pendant le travail ;
  • L’interdit de boire et de manger pendant le travail,
  • Les touchers vaginaux à répétition pour évaluer le travail, sans considération des autres facteurs exprimés par la femme ;
  • La direction chimique du travail (accélération/ralentissement du travail avec des hormones de synthèse) ;
  • L’analgésie péridurale ;
  • La poussée dirigée une fois atteinte la dilatation complète ;
  • L’expulsion en position « poulet de Bresse » (position gynécologique) ;
  • L’épisiotomie ;
  • L’utilisation des instruments (forceps, ventouse) ;
  • La césarienne ;
  • La délivrance dirigée (injection de syntocinon au moment du passage des épaules, en prévision du risque d’hémorragie du post-partum lors de la délivrance du placenta) ;
  • L’expression abdominale pour décoller le placenta ;
  • Le clampage précoce du cordon et la séparation mère/bébé pour les premiers soins ;

 

Alors parlons-en franchement, des « gros risques » qui font peur à tout le monde quand on parle d’un projet d’AAD (je répète, toujours dans le cadre d’une grossesse sans complication et encadrée par une SF) :

> Le bébé ne « passe » pas

2 cas de figure :

Soit le bébé ne peut pas s’engager dans le bassin (bassin maternel trop étroit, cordon trop entouré donc trop court). Si l’étroitesse du bassin n’a pas été diagnostiquée pendant le suivi, la SF sera alertée pendant le travail par une progression non physiologique du bébé ou des anomalies du rythme et demandera un transfert .

Soit le bébé peut s’engager dans le bassin et à ce moment là il n’y a aucune raison qu’il ne puisse pas être expulsé si on respecte le réflexe naturel d’éjection du fœtus (lire M.Odent à ce sujet). L’utilisation de forceps/ventouse n’est que la conséquence de réflexe d’éjection du fœtus non respecté, soit à cause de la péridurale (réflexe non ressenti), soit à cause de perturbations extérieures et de protocoles qui imposent le moment de pousser lorsque la dilatation est à 10, alors que le réflexe peut survenir avant ou après. A la maison, ni péridurale ni protocole, la maman n’est pas incitée à « pousser » ; quand son enfant pousse, elle le laisse venir simplement, souvent sans l’assistance de la SF. Le réflexe d’éjection du fœtus est un réflexe subtile, facilement perturbé par les interventions extérieures ; ainsi M.Odent conseille aux SF AAD de ne plus écouter le cœur du bébé via un monitoring une fois le bébé engagé dans le bassin, car cela peut suffire à perturber le réflexe ! Encore une fois, l’accouchement à domicile c’est l’art d’en faire le moins possible tout en restant hypervigilant, deux composantes de la pratique obstétricales incompatibles avec la pression qui est mise sur les équipes en salle de naissance !

 

> La souffrance fœtale 

En l’absence de travail dirigé chimiquement et d’analgésie péridurale et grâce à la mobilité de la maman tout au long du travail, le risque d’une dégradation brutale du RCF est faible ; le bébé suit son chemin à son rythme, il n’est pas bousculé ! « Quand on ne perturbe pas les processus physiologiques, on élimine pratiquement les risques de souffrance foetale. […] La principale cause de souffrance foetale, c’est la compression de la veine cave par le gros utérus et le gros bébé lorsque la mère est sur le dos. Quand le travail marche bien, que la position penchée en avant élimine toute compression des gros vaisseaux, pourquoi une souffrance foetale apparaîtrait-elle ? » (M.Odent dans Intimes Naissances).

Nous avons vu que, quoi qu’il en soit, la SF a le matériel nécessaire pour détecter efficacement un rythme cardio-fœtal (RCF) anormal et demander un transfert. 

 

> L’hémorragie du post-partum (HPP)

L’HPP, c’est le truc qui fait peur à tout le monde car ça peut être dramatique. Elle survient lorsque le placenta ne se décolle pas correctement, qu’un morceau reste à l’intérieur de la mère par exemple.

De quoi le placenta a-t-il besoin pour se décoller ? Il a besoin que les contractions reprennent. Qu’est-ce qui induit les contractions ? L’ocytocine. Et qu’est ce qui va favoriser la sécrétion d’un pic d’ocytocine à la naissance ? La rencontre de la mère et de son bébé, au chaud et SANS AUCUNE INTERVENTION / PERTURBATION.

«  Quand on parle comme les physiologistes, tout n’est pas fini quand le bébé est né…Il y a la 3ème phase de l’accouchement, qui se terminera par la délivrance du placenta. On pense aujourd’hui que pendant cette courte phase se joue en partie le développement de la capacité d’aimer. Il y a un évènement clé à ce moment là, c’est le pic d’ocytocine que la mère est capable de sécréter immédiatement après la naissance du bébé. Ce pic d’ocytocine est vital car nécessaire pour une délivrance facile du placenta sans perte de sang ; il est vital aussi puisque l’ocytocine est le type même des hormones de l’amour. […] c’est une hormone « timide » : sa libération dépend beaucoup de l’environnement. On peut faire des analogies : on ne peut pas faire l’amour si l’on sait qu’il y a un terroriste avec un revolver dans le couloir, par exemple. Il est important de clarifier quel type d’environnement permet ce pic d’ocytocine.
D’abord, dès que bébé vient de naître, il faut qu’il fasse très chaud. […] L’autre condition est que la femme n’ait rien d’autre à faire que de ressentir le contact avec la peau de son bébé, de voir ses yeux, de sentir son odeur, sans aucune distraction. Là, c’est le gros problème ! Dès qu’un bébé vient de naître, il y a toujours quelqu’un qui veut dire ou faire quelque chose ! Toutes les cultures ont perturbé la relation entre la mère et son bébé. Un exemple : la femme vient d’accoucher, elle a oublié le reste du monde, elle découvre son bébé. Quelqu’un vient avec 2 pinces et une paire de ciseaux pour couper le cordon. Qu’est-ce-que fait la femme ? Elle regarde ce qui se passe, retombe de sa planète et elle ne sécrète pas son pic d’ocytocine. Ensuite, on se demande pourquoi la maman saigne en délivrant le placenta…Ou bien, c’est l’excitation générale quand le bébé vient de naître, tout le monde se met à parler…Ce sont les grandes causes d’hémorragie. Alors parler de physiologie, c’est presque une obligation aujourd’hui…
Cela fait plus de 25 ans que je n’ai pas vu d’hémorragie de la délivrance ; je n’ai jamais utilisé un seul médicament pour cela. J’ai accepté 2 fois à Londres des accouchements à domicile de femmes qui avaient eu une hémorragie lors d’un 1er accouchement. L’une d’elles avait accouché à la maison de son 1er enfant, avec des sages femmes communautaires, comme on les appelle ici en Angleterre. Puis, elle s’est mise à saigner. Transfert à l’hôpital, délivrance artificielle du placenta, transfusion…Pour le suivant, elle voulait accoucher à nouveau à la maison. Aucune sage femme ne voulait venir. J’ai cherché à savoir ce qui s’était passé lors de cette 1ère naissance. Les 2 sages femmes ont commencé à parler du placenta dès que le bébé est sorti. C’est la pire des choses à faire. Au lieu de laisser la mère s’intéresser à son bébé, on l’intéresse au placenta…Sachant cela, je n’ai pas hésité une seconde. Pour moi, une hémorragie de la délivrance, c’est pratiquement toujours la conséquence d’une interférence inappropriée : on a parlé, on a distrait, on est intervenu... »
(M.Odent dans Intimes Naissances).

A l’hôpital, ce temps de la rencontre est toujours perturbé.

De plus, les études ont prouvé que l’utilisation du syntocinon pendant le travail augmente le risque d’HPP, puisque cela « induit le corps » en erreur de sorte qu’il n’est plus capable d’en produire un pic naturel d’ocytocine au moment de la naissance. Ainsi, certes à l’hôpital on réduit le risque d’HPP en injectant de l’ocytocine de nouveau au moment du passage des épaules (=délivrance dirigée), mais c’est une pratique justifiée uniquement par la médicalisation des étapes précédentes !

A l’hôpital, l’expression abdominale pour favoriser l’expulsion du placenta est toujours d’actualité dans de nombreuses structures ; or lorsqu’il se décolle naturellement, le placenta le fait d’abord en son centre et le poids du sang qui s’accumule ainsi permet un décollement symétrique et rapide des pourtours. Quand on appuie sur le ventre de la femme, on prend le risque de décoller le placenta d’un côté seulement, de créer un déséquilibre au niveau du poids et de l’arracher de façon incomplète !

Les études dont je vous ai parlé plus haut font état d’un risque hémorragique identique (2 études sur 4) ou significativement moindre (2/4) à la maison par rapport à l’hôpital, alors qu’en toute logique il devrait être augmenté puisque la délivrance n’est pas dirigée (les études montrent que la délivrance dirigée en structure réduit par 2 le risque d’HPP) : Il semble donc que l’AAD soit un facteur protecteur pour le risque hémorragique.

Ainsi la sage-femme va, pendant la grossesse, investiguer tous les facteurs à risques associés à l’HPP (pathologie de la coagulation par exemple). Le jour J, elle va laisser tout le temps de la rencontre nécessaire pour que reprenne les contractions, sans intervenir, en gardant seulement la maman bien au chaud.. Si vraiment le placenta ne se décolle pas, elle peut injecter du syntocinon ou demander un transfert pour la délivrance. Dans le documentaire « entre leurs mains », Jacqueline Lavillonnière parle très bien de cette peur de « robinet de sang ouvert » : de toute sa carrière de SF AAD (près de 40 ans), elle n’a jamais eu d’HPP…

accoucher à la maison est-ce dangereux
Je vous dis pas la tronche des gens dans le RER quand leurs yeux se posent sur la couverture du bouquin…

Conclusion

On peut parfaitement dire, malgré tout cela, qu’on se sent personnellement plus en sécurité à l’hôpital qu’à la maison pour accoucher, et à ce moment là ce seul facteur suffit à rendre la naissance à l’hôpital potentiellement plus sécuritaire. On peut parfaitement dire qu’on ne souhaite pas se passer de l’analgésie péridurale, qu’on tient à ses quelques jours à la maternité sans les ainés, qu’on a besoin d’être dirigée pour se sentir en confiance… Mais ce qu’on ne peut pas, c’est balancer à l’emporte pièce que « accoucher à la maison, c’est plus dangereux qu’accoucher à l’hôpital » et que les femmes qui font ce choix sont inconscientes 😉

 

 

Sources :

J’accouche bientôt, que faire de la douleur ?, Maitié Trelaun

Intimes naissances : choisir d’accoucher à la maison, Juliette Colonge

Le bébé est un mammifère, M.Odent

Documentaire « Entre leurs mains », Céline Daramayan.

40 réflexions au sujet de « Accoucher chez soi, est-ce que c’est dangereux ? »

  1. Merci infiniment pour ton article impressionnant ! Tant d’informations, précises et complètes, c’est vraiment super ! Tu as levé certains doutes en moi…bientôt, peut-être, serai-je prête à prendre ce Chemin. Reste plus qu à bâillonner ce foutu neocortex !

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  2. Superbe! C’est tellement bien écrit et ça m’a tellement rappelé ce que j’ai vécu (même si c’était à l’hôpital, j’étais suivie en accompagnement global et nous avons été tous les 3 puis tous les 4 tout le temps) que j’en ai eu les larmes aux yeux (oui oui) par moment…
    Comme tu le dis si bien, la merveilleuse SF est là, elle veille et surveille et le cocon mis en place est incroyablement doux.
    J’ai fait ce choix d’accouchement en connaissance de cause mais j’ai encore appris des choses aujourd’hui grâce à toi… merci pour ce bel article!
    (Et plein de belles choses à venir pour ton projet)

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  3. Belle conclusion! 🙂
    NB: pour les cris qui pourraient effrayer les autres mères en train d’accoucher, c’est drôle, je fais le raisonnement inverse. Pas de troisième en vue, mais bon j’y ai quand même réfléchi 😉 en me disant que je me voyais pas autrement qu’à la maison et qu’en même temps, je ne voulais pas terroriser les voisins, vu l’intensité des cris poussés à la naissance de la deuxième en plateau technique (j’ai peut-être fait grimper le taux de péridurale cette nuit-là…)
    NB2: chapeau pour « oser » laisser apparaître la couverture du bouquin dans le RER, ahahaha! Moi, je camoufle, soit en pliant le bouquin, voire en mettant une feuille de papier par au-dessus!

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  4. Merci de mettre ainsi l’AAD à l’honneur. Je voudrais par contre juste te mettre en garde contre trop de généralités, il y en a très, trop, peu de SF formés au physio et qui exerce en mat mais il y en a. J’étais en accompagnement global et comme j’ai été déclenchée pour dépassement de terme mon SF libéral n’etais pas là quand je me suis rendue en salle de naissance, a 6cm. La SF de la mat m’a posé un monito mobile et m’as dit «je sais que ce n’est pas votre projet que je sois là, est ce que vous voulez que je m’en aille ?». Je vénère cette femme qui a accueillie ma fille dans ses bras et me l’a posée sur le ventre au terme d’un accouchement enchanteur. En maternité.
    Bon cela dit je vais sérieusement réfléchir à un AAD pour le second….

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  5. Bel article, c’est tellement évident lorsqu’on te lit, j’ai accouché à la maternité pour mon 2e (la meme que pour mon 1e) mais si j’avais lu tout ça avant j’aurais peut être fait le choix d’accoucher à la maison ! Surtout que j’ai eu l’immense chance d’avoir eu autour de nous 2 SF extra et que je me suis sentie comme chez moi (à la péridurale près..!) : bulle intimiste, bebe qui est venu tout seul, rien n’était trop intrusif, discrétion des SF, j’ai sorti mon bebe et gros câlins après, délivrance du placenta niquel… donc effectivement lorsqu’on écoute le corps de la future maman et qu’on laisse faire les choses naturellement, y’a pas de raison que ça ne marche pas 🙂

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  6. À force de vous lire sur ce sujet, je suis de plus en plus tentée… Même si, après un premier accouchement par césarienne, l’aad n’est pas pour moi, à mon grand regret 😦
    Cela dit, le sujet m’intéresse beaucoup : pour défendre désormais cette amie qui a accouché deux fois à la maison et dont on dit encore, 5 ans et aucune complication plus tard, qu’elle est folle ! Pour regarder mon accouchement mal vécu avec beaucoup plus d’indulgence et de tendresse envers moi-même. Grâce à vos articles, j’arrive à admettre qu’imposer un déclenchement à une femme qui a dépassé son terme de deux jours alors que le bébé va très bien, c’est inacceptable. Et qu’il y a là une forme de violence obstétricale. C’est tellement libérateur d’oser le penser : merci !
    Je vous souhaite de tout cœur que ce beau projet d’aad aboutisse. Et bravo pour vos lectures dans le RER 😉

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  7. Merci pour cet article riche en informations !
    Attention cependant à ne pas diaboliser les maternités, pour celles qui ne peuvent ou ne veulent accoucher ailleurs (ce qui demeure un choix très personnel). Il serait dommage que les personnes qui privilégient la seconde solution craignent ou perdent confiance dans les personnes qui les accompagneront. Les pratiques évoluent et de plus en plus de maternités mettent tout en oeuvre pour que l’accouchement se déroule au plus près des souhaits des parents, et ce serait à mon sens injuste de ne pas le reconnaître.
    Personnellement, dans l’ensemble (si on fait abstraction du « monitoring d’accueil »), bien que j’aie accouché en maternité, notre intimité et nos souhaits ont été respectés. Nous étions dans un lieu calme et accueillant (en l’occurrence, une salle nature, avec canapé, lianes pour se suspendre, ballons, baignoire, lumière tamisée, musique de notre choix) et avons été très très peu « dérangés », toujours par la même personne, discrète et bienveillante. J’ai pu manger et boire. Je n’ai pas eu l’impression de subir de geste inadapté et n’ai subi aucune épisiotomie. A sa sortie, j’ai immédiatement pris mon bébé sur moi et il ne m’en a été retiré que parce qu’il n’allait pas bien (gris bleu, complètement atonique, ne reprenant pas sa respiration). Dès l’instant où il a été mieux, mon bébé a été blotti contre moi, à même ma peau (il n’a été ni pesé, ni lavé, ni habillé) et on est restés comme ça, tous les trois, pendant 2H.
    A ce sujet, et parce que votre projet d’AAD me bouscule et me fait sincèrement réfléchir, j’aurais souhaité vous poser une question à laquelle (sauf erreur de ma part) vous ne répondez pas. Savez-vous ce qu’il se serait passé pour mon bébé si j’avais été à la maison ? Son score d’Apgar était quasi nul car il avait été étranglé pendant plusieurs minutes par son cordon ombilical (ce qui ne peut a priori pas être détecté avant la naissance). A la maison, quelle aurait pu être la réponse apportée ? Je serais intéressée par la réponse, si jamais vous l’avez croisée au fil de vos lectures, car elle conditionne très clairement mon cheminement vers un autre type d’accouchement.

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    1. Bien sur on est d’accord, il y a pleins de progrès fait dans certaines structures 🙂 meme si ce n’est pas la majorité. Je pense que personne na vraiment besoin qu’on défende la sécurité de l’accouchement en structure donc mon propos ici c’était vrmt de montrer tous les facteurs qui sécurisent l’AAD et la façon dont l’hôpital peut rendre la naissance moins safe, puisque c’est ce genre de choses qu’on ne dit pas assez.
      Mais il est évident que tous les soignants ne sont pas les mêmes, les structures non plus, et heureusement il est possible dans certains cas d’avoir de beaux accouchements physiologiques et respectueux en structure 🙂

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    2. Concernant votre question je me renseigne plus en détails, mais a priori je dirai que la SF aurait fait les gestes nécessaires pour pallier a la détresse respiratoire comme elle est formée a le faire.

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    3. J’ai lu un témoignage dans « intimes naissance » dune sage femme qui a vécu un moment de peur car le bébé s’est présenté en siège a la sortie (alors qu’il était dans le bon sens en début de travail, situation très rare donc !!!) et quelle a vu que le cordon ne battait plus pendant l’expulsion. Le bébé est sorti en état de mort apparente, ne respirant pas. Elle a fait les gestes de réanimation et de prise en charge et le bébé a repris ses esprits.

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  8. Merci de nous faire passer (nous les mamans ayant accouché à domicile) pour des mamans comme les autres qui ne veulent rien d ‘autres que ce qu’elles estiment être le mieux pour son enfant. On est loin de la folle, inconsciente et irresponsable dont j’ai si souvent entendu parler.
    Autre facteur à prendre en compte, ma sage-femme m’a confié avoir noté ( simple constatation sans aucune étude scientifique à l’appui) qu’en cas d’accouchement à domicile le bébé ne subissait qu’une infime ( voire souvent aucune) baisse de poids à la naissance…à vérifier 😉😊

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  9. Un immense merci pour cette belle synthèse bien documentée, un article qui je l’espère permettra à des femmes de faire un choix éclairé, en conscience 🙂
    Ps: j’ai adoré ton commentaire sur la tête des gens dans le métro^^
    Je te souhaite une belle préparation à ton accouchement et un beau moment intime.

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  10. Enceinte du 2ème, je n’envisage pas d’accoucher à la maison (je préfère être franche !). Je n’ai rien contre ce choix, chacune doit être libre 🙂
    Il faut dire que pour mon 1er accouchement, j’ai fait tout le travail toute seule à la maison (oui oui), en quelques heures (3h ou 4h à peine) et que quand Monsieur m’a finalement emmener à la maternité, j’étais déjà à complète 😉 Donc 30min avec l’équipe ! J’étais dans ma bulle, je ne sais pas pas qui était là… Il parait que j’avais le monito, mais je ne m’en souviens même pas.
    Je confirme avoir pris un long bain, qui a accéléré le travail, puis avoir passé un moment à quatre pattes sur un lit, en hurlant « comme un cochon » lol ! J’ai aussi hurlé à la maternité ! et ça m’était bien égal 😉
    J’avais choisi de faire sans péridurale, je n’ai jamais regretté. La SF avec qui j’avais fait la prépa respectait ce choix.
    Comme quoi, on peut combiner un peu maison et CHU… 🙂

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  11. Encore un bel article, très bien écrit et très bien expliqué.
    je viens de commencer la lecture de Accoucher par soi même de Laura Kaplan Shanley et ça m’a toute suite fait penser à toi.
    Pourrais-tu nous donner les références/liens des études que tu as lu? je trouve ça vraiment intéressant

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  12. Waouw, il est vraiment super complet ton article!
    Merci pour la dernières partie et détails des risques avec le pourquoi du comment. Je ne m’était pas encore penché sur la question.
    Enfin, ça serait bien qu’in avance quand même un peu plus vite avec l’AAD et les maisons de naissance. Parce qu’après, on peut parler de trou de la sécu mais on fait vraiment pas grand chose sur certains sujet pour limiter les dépenses!

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  13. Merci pour ce bel article très éclairant. Après un bébé prématuré né à 28 SA je ne pense pas que j’oserai l’AAD pour le second (qui est seulement dans notre coeur pour le moment) mais je le regrette tout de même.

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    1. En cas de prématurité, l’AAD n’est pas une option 🙂 mais rien ne vous empêche de l’envisager pour ce deuxième bébé s’il parvient jusqu’au terme des 37 SA,tout en étant inscrite ailleurs en parallèle 😉 bon cheminement en tous cas !

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  14. Bonjour,

    C’est mon premier commentaire sur le blog et comme beaucoup de lectrices et lecteurs j’espère aussi… je voulais vous encourager pour la qualité des écrits et les réflexions que vous faites naître au quotidien. Même si je ne suis pas forcément toujours d’accord avec tout, J’apprends beaucoup et essaye de me servir des trucs et astuces à mettre en place avec ma fille de 2 ans. j’ai aussi grâce à vous investi dans pas mal de de bouquins qui m’aident à relativiser notamment dans les moments de grande colère de ma petite chipie !
    Votre article me fait réagir car lors de la naissance de ma fille, j’ai fait une hémorragie de la délivrance grave pendant laquelle J’ai dû être transfusée. Mon utérus ne contractait plus pour l’expulsion du placenta.
    J’ai eu un accouchement plutôt naturel, sans peri, mais je m’interroge tout de même en vous lisant sur le fait que l’hémorragie aurait pu être évitée. Bon au final le principal est aujourd’hui que je sois en vie… toutefois quand je pense à une 2eme bébé, j’aurais l’envie pas forcément d’accoucher à domicile après ce qui s’est passé, (le traumatisme reste présent) mais au moins dans une maison de naissance ou au « pire » 😉 Dans une maternité de niveau 1. Alors que mon obstétricien m’assure que pour moi maintenant les accouchements se feront forcément en niveau 3. Bref désolée du pavé. Je sais qu’en terme de suivi médical chaque cas est différent cependant en vous lisant je me pose plein de questions et me demande finalement que faire de tout ça car j’ai l’impression que le corps médical est encore fermé à beaucoup de choses…

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  15. Malheureusement, vous écrivez tellement bien, avec de belles idées (sans ironie de ma part) que pleins de petites et grosses conneries passent comme une lettre à la poste! (Mais elles ne sont peut-être pas de vous).
    ATTENTION lectrices, joli blog, séduisant,mais il y en a à prendre et à jeter (bon par contre c’est tellement long, j’avoue, je n’ai pas pris de notes au fil de ma lecture et j’ai la flemme de recommencer).
    En revanche, je comprends votre envie de respect de la physiologie.

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      1. Non ce n’est pas facile. Vous documentez vous propos, certes mais vous mélangez certaines choses pour étayer vos pensées, vos croyances (c’est bien humain mais ce n’est pas très scientifique).Et ce n’est pas parce qu’on tartine des pages et de pages que le propos est documenté correctement.

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      2. Très bien mais il me semble que dans cet échange s’il y a un propos qui n’est pour l’instant pas documenté c’est le votre. Vous affirmez que cet article est plein de conneries, dites nous lesquelles et pourquoi !

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    1. Bonjour Nénette, je suis une lectrice assidue de ce blog que j’apprécie entre autres parce que le propos est argumenté et les sources sont indiquées. Pourriez-vous être plus précise ? Que reprochez-vous exactement à cet article et aux autres ? Essayer de jeter le discrédit tel que vous le faites, sans exemples​ ni explications, ce n’est pas très sympa pour l’auteur et c’est inutile pour les lecteurs.

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  16. Peut être que Nenette n’a pas eu ou ne pourra pas avoir un accouchement physiologique et qu’elle ne l’accepte pas. Dans toute forme de méchanceté il y a un fond de jalousie…
    Pour ma part je ne peux accoucher de manière naturelle. La césarienne n’est pas une possibilité, c’est devenu une obligation. Néanmoins j’ai plaisir à lire les articles de votre site car ils sont étayés et bien rédigés. J’aime l’idée que les femmes soient fortes et assument leurs choix. Cela fait un bon exemple pour nos enfants. Croire en quelque chose et se donner les moyens d’y arriver, à l’image d’un athlète qui prépare sa compétition de nombreux mois et meme années à l’avance.

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    1. Bonsoir mesdames, je souhaitez vous répondre tranquillement, mais malheureusement je travaille beaucoup, et je surf sur mon smart phone la nuit quand je ne travaille pas, entre deux tétées souvent.Ce week end je ne travaille pas mais je suis sur la route (mariage…)bref, difficile de détailler dans ces conditions tous les points de désaccord.
      Pour ce qui est de ma vie personnelle, sachez seulement que je ne suis pas frustrée, j’ai eu la chance de mettre au monde deux magnifiques enfants (en toute objectivité!)par voie basse avec péridurale pour le premier, je n’envisageais pas faire autrement à l époque.Pour le second je me suis dis que je pourrais peut être m’en passer si ça allait vite ou si l’ anesthésiste tardait…..et c’est ce qui s’est passé!
      Dans les deux cas mes bébés sont restés contre moi, à téter, je dirais peut être une heure mais ce souvenir est tellement dématérialisé que je n’en suis pas sûr. Bref j’ai eu la grande chance de vivre deux magnifiques (encore)naissances.
      Je réagit simplement sur ce post pour apporter de la nuance, mais je suis bien consciente que c’est difficile de nuancer des passionnées! Comme j’expliquais sur un autre poste, quand tout va bien tout va bien et ce qui se passe le plus souvent. Quand ça merde par contre (et pas qu’à cause de la iatrogènie, car en physiologie ça merde aussi!!!penser le contraire est de l’obscurantisme) ça peut merder très très très vite, alors le temps du transfert est une perte de chance.

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      1. Mon cheval de bataille serait plutôt de refaire rentrer la physiologie en structure, de faire prendre conscience aux femmes des sociétés « modernes »qu effectivement , elles savent accoucher, de façon innée.
        Pourquoi dénigrer les progrès et bénéfices qu’à apporter la médicalisation pour certaines???

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  17. Quelques commentaires, en précisant que je bosse au quotidien pour que les femmes puissent accoucher là où elles le souhaitent et dans des conditions respectueuses de leur souhaits et de leurs besoins. Et que donc, bien sûr, je n’ai aucune position anti-aad. D’abord, votre travail d’information est très intéressant et cela peut ouvrir des réflexions à certains qui n’avaient pas ces notions en tête. Donc bravo!

    Sinon les établissements ne sont plus payés à l’acte mais, depuis la T2A, sur la base d’un forfait accouchement établi pour les maternités de structure comparable. Faire plus d’actes ne paye plus. Ce n’est donc pas la rentabilité économique éventuelle qui explique l’interventionnisme mais la façon dont se construisent les pratiques professionnelles.

    Je pense ensuite qu’il y a un vrai biais à comparer le résultat d’un AAD à celui d’un accouchement en maternité et que ce n’est d’ailleurs sans doute pas le meilleur moyen de le défendre, bien que ce soit sans doute celui qui vient le plus spontanément à l’esprit dans le contexte actuel. Car effectivement, le risque c’est de laisser penser (je ne dis pas que c’est ce que vous souhaitez) que seule la situation de l’AAD est susceptible d’assurer la sécurité d’une femme. Et bien sûr, ce n’est vrai que pour la femme qui considère que sa sécurité est là!

    Il faut aussi regarder les choses sous un angle un peu plus distancié. Déjà le public de l’AAD n’est pas le même. Je ne vais bien entendu pas remettre en cause la iatrogénie de l’hôpital sur les accouchements, je bosse tous les jours sur la question et avec l’espoir que cela change. Toutefois, on ne trouve aucune précaire en AAD, pas de femmes à la rue, pas de cardiaque, pas de femmes en obésité morbide, pas de femmes avec une pathologie chronique, en dépression profonde, etc, etc… Donc l’AAD ce sont des femmes en bonne santé, qui veillent d’ailleurs sans doute plus que d’autres à leur santé globale, avec une relation conjugale équilibrée (car l’AAD sur un couple en conflit, ça ne colle pas) et globalement, d’un milieu plutôt favorisé et en tout cas sans pb économique particulier. Tout cela aidant à être en bonne santé. Donc des femmes à bas risque chez qui c’est normal, quand on n’en fait pas trop, que l’accouchement se passe bien. J’ai bcp appris de Odent et de Lavillionière, mais leurs patientes ne sont de toutes façons pas à grand risque d’HPP…. (Je précise au passage que l’on peut faire une HPP avec un placenta totalement décollé et sans résidu in utéro, par non « fermeture » des canaux apportant le sang au placenta).

    De surcroît, pour l’HPP, ce sont les primipares qui sont le plus à risque. Or on constate que ce sont bcp plus souvent des multipares qui se tournent vers l’AAD dans les pays où ce mode d’accouchement n’est pas culturel. Donc oui, on peut constater qu’il y a très peu d’HPP en AAD, Mais de là à en déduire que l’AAD est un facteur protecteur de l’HPP, on voit bien que scientifiquement, ça ne fonctionne pas. En revanche, on sait clairement depuis une étude de l’INSERM en 2013 que l’usage d’oxytocine pdt le travail augmente de risque d’HPP. Donc ne pas en utiliser (sauf raison médicale bien sûr) préserve de l’HPP, que l’on soit à domicile ou en maternité (voir les recommandations de bonnes pratiques du Collège national des s-f, sorties en 2016 sur le sujet). Et comme jusqu’à présent, on n’en utilise très très majoritairement (et de façon arbitraire bien souvent) qu’en maternité, ceci explique cela. Quand les maternités suivront les recos ci-dessus, on devrait voir chuter massivement les HPP chez les femmes à bas risque en maternité, du seul fait de l’arrêt de cette médication déraisonnable.

    Ensuite, la sécurité d’une femme est toujours plus élevée quand elle est dans un contexte qui lui convient. Vous vous sentez en sécurité en préparant votre AAD, ce qui ajoute des « points » à votre pronostic. Mais si une femme se sent en sécurité en maternité, accoucher chez elle, même super bien suivie, n’aura pas cet effet favorable. Et donc là aussi, on ne devrait comparer que ce qui est comparable, à savoir une femme en sécurité chez elle en AAD avec une femme qui se sent en sécurité dans sa maternité. Sinon, l’étude ne peut être opérationnelle, car celle qui est mal au départ là où elle est ne réagira pas de la même façon. et comme en maternité, on a sans aucun doute plus de femmes insécures qu’à domicile, cela n’aide pas.

    Enfin, je comprends que vous vouliez montrer qu’un AAD n’est pas un choix déraisonnable, ne serait-ce que pour ne pas être prise pour une insensée. Toutefois, je ne pense pas que ces comparaison domicile/hôpital serve la cause de l’AAD, du fait des nbx biais. Ce qui plus intéressant, ce sont ce que veulent les femmes en général, qu’elles puissent le vivre et le vivre dans de bonnes conditions. Donc effectivement que cessent les accompagnements défaillants, les pratiques non ajustées voire iatrogènes et la violence qui peut de surcroît s’ajouter là-dessus. Il reste très peu de s-f faisant de l’AAD et celle qui perdurent sont des tenaces de qualité. Mais pour recueillir des témoignages de femmes et de couples très variés, on peut être aussi maltraitée à domicile ou en plateau technique, en accompagnement global, comme en maternité.

    D’ailleurs, on voit que sur les mêmes souhaits (ceux que vous aviez très bien exprimés dans votre précédent billet sur le sujet), les mêmes motivations et les mêmes raisons, certaines femmes et couples se tourneront vers l’AAD alors que d’autres choisiront d’avoir une démarche différente en maternité (soit une autre maternité, soit un autre dialogue dans leur maternité…). On voit donc bien que le choix est sans aucun doute aussi lié à des motivations intimes qui n’ont rien de scientifique et je trouve donc presque dommage de « rationaliser » la démarche. J’ai choisi avec mon mari, pour notre aîné qui a déjà 23 ans, une maternité strictement physiologique (et il n’y en avait vraiment pas bcp à l’époque). Il y avait en revanche bcp plus de s-f faisant de l’AAD, il y en avait d’excellentes dans ma région et pourtant, cela ne m’a jamais tenté. Pourquoi? Parce que la seule idée de n’avoir qu’un seule interlocuteur m’était très désagréable. J’avais un obstétricien exceptionnel, référent de mon suivi, mais je rencontrais en préparation des s-f différentes, je savais que j’en verrai des différentes le jour de la naissance, dans mon suivi et comme j’étais sure de la qualité de leur travail, cette diversité me convenait à merveille, car j’aime la diversité et que je m’y sens à l’aise. En revanche, je ne suis absolument pas fusionnelle (c’est une notion qui me fait fuir) et cette relation avec une seule s-f en AAD me semblait bien trop exclusive. Et il n’y avait besoin d’aucun autre argument!

    Donc vous avez choisi l’AAD parce que ça vous convient et c’est très bien ainsi. Si c’est vraiment cela qu’il vous faut, même si les statistiques étaient en défaveur de ce mode d’accouchement, cela ne changerait pas la pertinence de votre choix tant que vous êtes dans le cadre qui lui correspond! Donc que ce soit sûr ou pas en général n’est pas la question, l’important, c’est que c’est manifestement sûr pour vous, et que vous êtes en accord avec votre choix. Plein de belles choses à vous!

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    1. Merci pour votre commentaire très intéressant 🙂
      En substance, vous dites exactement ce que je dis… Notamment, j’ai dit plusieurs fois que le fait de se sentir en sécurité était a lui seul un facteur de sécurité de l’accouchement, et que pour cette raison il NY a pas un modèle meilleur pour toutes les femmes, mais quil faut œuvrer pour que chaque femme puisse faire le choix qui lui convient.

      Le biais dont vous parlez dans les études est contrôlé : certes l’échantillon AAD est auto sélectionné, mais du coup les femmes accouchant en maternité ont été choisie pour leur correspondre notamment en terme de bonne santé générale, conditions de vie, niveau socio économique etc…

      De même pour le risque d’HPP, ma formulation est peut être maladroite, mais c’était important pour moi d’insister sur ce point qui est LE GROS point qu’on oppose aux femmes qui veulent accoucher chez elle et qui jusitiferait de les traiter de folles. Dire que quand on choisit l’AAD on a déjà a la base un faible risque d’HPP + on nous injectera pas de syntcinon pendant le travail + on respectera le tps de la rencontre, c’est bien donner les éléments qui font que le risque d’HPP est faible lors d’un AAD.

      Enfin, globalement je pense que je n’ai pas assez insisté dans CZ billet dans le fait que j’ai conscience que pleins de choses bien se font aussi en structure ou sont en cours d’évolution, puisque mon but c’était vrmt de répondre a l’idée répandue que l’AAD est strictement plus dangereux que l’accouchement hospitalier.

      Merci en tous cas pour votre éclairage 🙂

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  18. Et bien! Quelle découverte! J’ai accouché à la maison il y a 4 ans et demi, non par choix, mais parce que mon bébé est arrivé trop rapidement et on n’a pas eu le temps de partir à l’hôpital. Les secours sont arrivés peu après sa naissance… heureusement, car elle était inanimée, ne semblait pas respirer… ils l’ont prise en charge, cela a mis beaucoup de temps, nous avons eu très très peur de la perdre, et moi, j’ai fait une hémorragie qui a bien failli m’emporter… jusqu’ici, je n’avais aucune explications à ces deux phénomènes. Maintenant, il semble bien qu’il s’en dessine une quant à cette hémorragie au moins. Merci!

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  19. Bonjour,
    Voici l’étude officielle aux Pays-Bas en 2009 (échantillon: plus d’un demi-million de femmes avec une grossesse physiologique): http://www.knov.nl/fms/file/knov.nl/knov_downloads/526/file/Midwifery_in_The_Netherlands_versie_2017.pdf?download_category=overig
    Page 13: « An extensive cohort study about the safety of planned home birth versus planned outpatient hospital birth in the Netherlands showed that a planned home birth was just as safe as a planned outpatient hospital birth. This study included nearly 530.000 low-risk women and was published in the Britisch Journal of Obstetrics & Gynaecology (BJOG , 2009). »

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  20. Je découvre cet article et de ce fait tous vos super posts.
    Merci cet article est parfait et si juste pour moi et mon homme 💜
    Tip top votre blog!!!!

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  21. Si on obtient un nombre de bébés et mamans en bonne santé lors d’un AAD que dans une maternité, sachant que pour l’AAD on a que des grossesses sans risques ni antécédent et dans les mater on a de tout, ca ne me parait pas positif pour les AAD ! (Mais je suppose que c’est un problème d’explication.)

    L’AAD m’a intéressé lorsque j’étais enceinte mais j’avais la chance d’habiter pas trop loin d’une maternité qui m’a beaucoup plu. J’ai pu la visiter plusieurs fois, les sages femmes y sont adorables, il n’y a pas de salle de pré-travail (lorsqu’on est admise on reste dans la même chambre jusqu’à après la naissance), encouragement à la sortie dès quelques heures à la naissance pour les mamans qui le souhaitent…
    J’ai donc décidé d’y accoucher avec plaisir. Lorsque je suis arrivée, j’ai demandé à la sage-femme ma dilatation et j’étais à 6cm ! Trop heureuse! Elle m’a installé un monitoring qui me permettait de bouger et de me déplacer. Au bout de 20 minutes, le monito a perdu le rythme cardiaque du bébé et la sage-femme essayant de me rassurer n’a pas réussi à le retrouvé. Je suis partie en césarienne d’urgence, mon bébé est né moins de 3 minutes après. Il ne respirait pas (plusieurs tours de cordons autour du cou). Les médecins ont mi de nombreuses minutes à le réanimer.

    On ne peut imputer ce qui c’est passé ni à mon stress (je baignais dans le bonheur en arrivant), ni à une intervention de la mater (je n’avais même pas eu de perfusion !). Juste la malchance d’avoir un cordon farceur au dernier moment et une grande chance d’avoir des médecins aussi réactifs et professionnels.
    Je ne peux pas m’empêcher de penser que si j’avais décidé d’accoucher à la maison, les 15 min de plus pour atteindre l’hôpital m’aurait privé de mon petit garçon. (Ou si j’avais décidé de continuer à gérer les contractions peu douloureuses chez moi et de venir à la mater plus tard…)

    Je sais que c’est un cas hyper rare, que je ne suis qu’une des statistiques improbables mais pour le coup, je ne pourrais jamais plu envisager l’AAD.
    Je reste fascinée par les récits de tous ces beaux accouchements à domicile et je suis ravie pour les parents et leurs bébés.

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