0-3 ans : S'attacher·Accueillir la vie

Vais-je aimer mon enfant ?

Je ne m’étais pas trop demandée si j’allais aimer Mademoiselle Carrousel ; j’avais l’impression de l’avoir attendue toute ma vie, ou presque, alors ça allait de soi que j’allais l’aimer !

Et je me suis pris une tornade d’amour dans la gueule quand elle est née. Respectivement, j’ai compris que j’avais intellectualisé le concept de l’amour parental sans anticiper comme ce serait bouleversant de le vivre en vrai.  En réalité, je ne savais pas à quoi m’attendre, comment cet amour se manifesterait dans chaque geste, chaque choix, chaque mot, comment il me prendrait aux tripes, comment il me surprendrait au détour de gestes anodins, comment il exploserait dans mon coeur de façon totalement inattendue, comme sa force extraordinaire éclaterait dans les moments les plus ordinaires, comment parfois j’aurais mal un peu partout de tant l’aimer.

Alors quand j’attendais notre petite Fusée, j’avais très peur de ne pas l’aimer, en tous cas pas autant, pas aussi éperdument. A nouveau, j’en étais revenue au concept de l’amour, à l’idée, au cerveau. Ça me semblait mathématiquement insoluble tant ma Carrousel remplissait mon coeur, de faire de la place a quelqu’un d’autre, de lui faire une place aussi grande, malgré les nombreux témoignages autour de moi qui me disaient le contraire. Je ne voyais pas comment ressentir tout cela a nouveau, comment donner autant à un nouvel enfant sans prendre un peu à ma Carrousel, comment une quasi inconnue pourrait susciter le même feu d’artifice emotionnel en moi que la merveilleuse petite fille que je chérissais depuis 3 années. 

Et puis ma Fusée est née et chaque jour, depuis le premier jour, elle me rappelle que l’amour n’est pas un concept rationnel qui s’analyse, mais une force puissante qui nous submerge par tous nos sens. C’est incontrôlable, imprévisible, inimaginable. C’est un petit rien qui déclenche un tout. C’est le coeur qui se serre, les larmes qui montent, la joie qui explose, le bien être qui se faufile par tous les pores, la fierté qui dégouline, c’est la réalisation soudaine qu’on n’a besoin de rien.

Malgré les difficultés et les moments objectivement compliqués (la tout de suite avec 2 enfants malades sur 2, crises sur crises et nuits de merde sur nuits pourries, ne me branchez pas sur cette fréquence…) qui font dire qu’il n’y a aucune raison rationnelle de continuer à se reproduire, la magie opère, toujours sur fond de banalité.

L’amour, c’est par tous les sens que je le reçois comme un cadeau, qu’il me prend par surprise et me dévore une deuxième fois.

Les aimer c’est…

L’odeur enivrante dans les plis d’un cou.

Un petit corps tout chaud lové au creux du sien au matin.

Un grand corps ensommeillé à enlacer

Des petits cheveux tout doux sous les doigts.

Deux mains qui caressent un visage au coucher.

Une bouche qui cherche un sein, un corps tout entier qui se détend quand il est déniché.

Un regard fatigué qui cherche un câlin.

Un regard intense qui veut tout dire.

Un sourire qui crepite d’innocence.

Le poids d’un corps abandonné sur une épaule.

La caresse d’une joue douce contre la sienne.

Des mains qui s’ouvrent délicatement autour d’un visage reposé, quand le sommeil l’emporte.

Des petites pieds qui pédalent.

Quatre lèvres soyeuses qui se posent comme une caresse.

Un échange de regards complices.

Un éclat de rire qui éclabousse les murs.

Une peau qui glisse contre la sienne dans le bain.

Une bouche grande ouverte écrasée sur son épaule.

Un drap qu’on borde, une couverture qu’on remonte avec tendresse.

Un « areuh » lancé avec force, qui touche comme une flèche en plein coeur.

Une mine rejouie qui quête l’approbation.

Un sursaut à chaque fois qu’on s’aperçoit d’un nouvel apprentissage fait à son insu.

Une toux, une fièvre, un regard vitreux qui tord le ventre.

Un regard déçu, peiné ou apeuré qui donne envie de se brûler les yeux pour ne plus jamais avoir à le revoir.

6 heures de sommeil en continu qu’on applaudi des deux mains.

Une scène qu’on observe à la derobée, le coeur gonflé de fierté.

Le pan d’une écharpe qu’on ressert autour d’un cou d’un geste protecteur.

Des baisers par milliers qui ne sont jamais assez.

Des doigts qui aggrippent son tshirt.

Le bruissement de la couette d’un réveil dans le calme.

La chaleur d’un souffle régulier au  creux de son oreille.

L’odeur du lait dans un cou.

L’étreinte de deux bras qui se jettent à pleine vitesse.

Un éclat de rire qui veut dire encore.

Une main qu’on serre dans la sienne, qu’on caresse en marchant, qu’on broie un peu quand un camion s’approche trop près du trottoir.

Un je t’aime qu’on murmure, un je t’aime qu’on reçoit.

La chaleur réconfortante d’un rituel.

L’emerveillement d’une découverte.

Le premier quelque chose qu’on range dans une boîte comme souvenir et qu’on redécouvre comme un trésor.

Le temps qui file qu’on contemple au détour d’une photo.
Un élan du coeur qui donne envie de dire merci à la vie.


18 réflexions au sujet de « Vais-je aimer mon enfant ? »

  1. Je viens d’accoucher, notre fils a 9 jours et je fais partie de ces mamans qui ne ressentent pas tout de suite cet amour maternel… Entre le Baby blues, la fatigue et les douleurs d’allaitement qui m’empêchent de le prendre dans mes bras, ca n’aide pas. Le papa par contre a fondu deux fois en larmes de bonheur…

    Même si je sais que ça arrive, c’est dur de ne pas culpabiliser et de s’inquiéter si ça ne vient pas…

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    1. Oh ma pauvre! Je vous comprends, je suis passée par là l’année dernière… La relation mère-enfant est délicate, et c’est une relation sur le long terme, laissez vous le temps, tranquillement. C’est difficile de s’aimer en tant que maman et d’aimer son petit quand c’est aussi difficile à vivre. Tentez de contacter la Leche League qui pourrait vous donner de bons conseils sur l’allaitement, et faites vous suivre pour votre baby blues, c’est important. Essayez de vous entourer de personnes bienveillantes à votre égard qui vous font du bien avec un regard positif sur votre maternité. Courage courage courage!

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    2. Oui ce n’est pas toujours instantanée et parfois cela prend beaucoup de temps. C’est un chemin comme un autre pour devenir maman, chaque maman a le sien.

      Je rejoins le commentaire précédent : au delà de difficultés et de boulversement hormonaux bien normaux a ce stade, n’hésitez pas à vous entourer de personnes bienveillantes qui vous donneront des conseils appropriés au lieu de vous enfoncer : LLL, maman blues, doula..

      Je vous envoie bcp de courage et de force. Pour ma part le premier mois je n’apprécie pas l’allaitement… c’est avec le temps que ça devient, pour moi, un moment d’amour….

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    3. De mon côté j’ai vécu la même chose que vous. Ça a mis du temps, j’étais épuisé, sous hormone…il m’a fallu 3 mois pour laisser le bonheur m’envahir. Maintenant mon bonhomme a 6 mois et c’est le sentiment d’être au bon endroit à la bonne place qui rythme chaque jours. Le bonheur immense et si simple de le voir grandir. Ne culpabiliser pas, ça viendra…

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      1. Merci pour vos réponses… Je sais que ça va me prendre un peu de temps mais que ça viendra. Nous sommes à l’étranger donc un peu isolés et loin de nos familles, mais j’ai une super sage-femme et nous sommes dans un pays très attaché aux enfants, une conseillère de LLL est venue dimanche matin exprès pour m’aider et j’ai la chance de pouvoir bénéficier d’un congé parental d’un an très bien indemnisé… Mais j’ai très peur de me retrouver toute seule en tête à tête avec mon fils et d’en avoir marre ou de ne pas arriver à gérer…

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  2. Très bel article, merci 🙂 Pour toi, je ne me posais même pas la question, quand tu as annoncé ta deuxième grossesse, c’était évident dans ma tête que tu allais être raide dingue de Fusée, non mé oh ;p

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  3. C’est (encore) très beau !
    De ma petite expérience de papa avec maintenant 2 petits, j’ai pu constater une chose : c’est que l’amour se cultive. Au quotidien, comme une fleur qui demande du soin pour s’épanouir. Un peu comme toi, j’ai cru à un moment que j’avais un « quota d’amour », comme un disque dur avec sa capacité limitée. Alors qu’on est en fait sur quelque chose qui est plus du domaine de l’univers : il est capable de s’étendre à l’infini… du moment qu’on en prend soin !
    « L’amour est le seule chose que le partage grandit ». Je trouve ça très beau et très vrai, et une belle illustration de l’amour dans une famille.
    Amicalement
    Arnaud

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  4. Très beau texte 😍. Moi aussi maman de deux enfants il me parle beaucoup 😊

    Par contre petite question par rapport à une de vos photos, vous avez quoi comme écharpe de portage et vous faites quoi comme noeuds ? 😀

    Bonne continuation et pleinnnnnn d’amourrrr

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    1. Bonjour Didelyne,
      Je me permets de vous répondre par rapport à notre cas personnel : nous avons depuis maintenant 4 ans une écharpe de la marque « je porte mon bébé ». C’est l’écharpe « originelle » car ils ont développé d’autres produits depuis je crois. Et cette écharpe est toujours en cours d’utilisation pour notre petit dernier ! On en est très content.
      Pour les noeuds, je dois avouer que je n’ai jamais réussi à faire ressortir mon côté breton 🙂 Mais on a utilisé les vidéos du site de la marque pour s’en sortir.

      Amicalement
      Arnaud

      PS : je n’ai aucun lien commercial avec la marque, c’est vraiment un retour d’expérience personnel !

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  5. Une pensée qui rejoint les miennes alors qu’on se demande si ce ne serait pas le moment de penser au 2ème … j’ai moi aussi l’impression que je serai incapable de donner autant au second quand je pense avec quelle force j’aime mon bébé d’amour …. belle nuit 🌙

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  6. C’est exactement ce que je vis depuis 8 jours…. Cet amour éperdu pour mon 3eme… Tout aussi fort et puissant que pour mes deux premières…
    À chaque enfant, l’amour ne se divise pas. Au contraire, il se multiplie

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  7. C’est tout beau, c’est trop beau. Je me retrouve totalement dedans. Je n’ai pas encore la chance d’envisager une deuxième grossesse mais je sais une seule chose: c’est une grâce dont je ne me priverais pas si j’en ai la possibilité.
    Ce que j’aime particulièrement avec ce texte et avec ton blog en général, c’est que trop souvent, on voudrait mettre en exergue les côtés « négatifs » de la parentalité, oubliant qu’il s’agit avant tout d’amour. Il y a des difficultés au quotidien cela est bien vrai mais la récompense dans ces petits yeux qui nous regardent avec autant de confiance, est juste WAOUUUH!!!

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